« On a qu’une vie ! », voilà ce que dit toujours papa pour me motiver quand je ne veux pas vraiment sortir de chez moi. Et si seulement il savait à quoi servait cette motivation. La grossesse était difficile ? Peut-être. J’étais sur la fin du premier trimestre. J’étais épuisée. Un peu trop. Pas assez. Le ventre se voyait petit à petit. Pas encore tellement. Il y a un peu plus d’une année, j’avais avortée. Ayant peur de me lancer dans mon enquête. Ma vendetta personnelle. Je n’en avais parlée seulement qu’à Owen. Lui et Léo aussi depuis peu. Mon mari ignore juste les détails enfin… il ignore beaucoup de choses. Ayant depuis peu remise les pieds dans cette histoire, j’avais enfin récupérée des informations sur le dossier du meurtre de maman et de mon kidnapping. Un nom que je ne connaissais pas était inscrit dedans. Pourquoi ? Je n’en savais rien. Qui était-il ? Encore moins. Un homme du nom d’Anthony Wilson. J’avais enquêtée sur lui. Découvrant alors qu’il avait un dossier confidentiel au MI6. Je n’avais pas eue accès aux informations. Il fallait une permission que je n’avais pas. J’avais donc cherchée sur google. Cet homme existait. Avocat. On en parlait souvent apparemment. Je tentais de me renseigner un peu plus. Le peu d’informations que je trouvais ne me suffisaient pas. Pourquoi étais-je alors en route pour son cabinet ? Peut-être simplement pour déceler plus d’informations. Savoir. Découvrir. C’était alors vêtu d’une robe courte assez amble et des bas collants finement transparent avec des cuissardes en velours que j’étais allée vers son cabinet. Je m’étais présentée sous l’une de mes fausses identité. « Kara Petterson » avait un rendez-vous avec lui à propos d’une affaire classée. J’étais bien identifiée comme un agent du MI6. Pas de secrets sur ce point. Pas du tout. Confidentiel, totalement. Une fois dans la salle d’attente, je posais alors ma plaque discrètement devant les yeux de la secrétaire. « J’ai rendez-vous à 15 heures avec Monsieur Wilson ! », disais-je alors que j’avais effectivement pris un rendez-vous avec lui. Certaines affaires nécessitent qu’on n’ait pas le temps pour ça, d’autres sont plus souples. Elle m’invitait alors à entrer dans le bureau. J’étais seule. Oui, seule. Dans le bureau d’un avocat à Bank ? Tout allait bien. Curieuse. Mon instinct d’agent de terrain me menait à regarder autour de moi. J’observais. Je calculais. J’enregistrais le moindre détail dans le creux de mon esprit. Ces photos de familles. Ces bouquins. Tout. Même la vue qui donnait assez bien sur la tamise. C’est quand la porte s’ouvrit que je me tournais pour me présenter. Je tendais ma main à l’homme au bouc. Remontant alors mon sac à main de mon autre main pour le reposer sur mon épaule libre. « Bonjour Monsieur Wilson, Je suis Madame Petterson, envoyée par le MI6 ! », disais-je simplement en le regardant. « J’aurais quelques questions à vous poser à propos d’une affaire classée datant de 1995 ! », disais-je d’un ton professionnel et sérieux. Je l’étais. Pourtant j’avais la main moite.

   
Aujourd'hui était un jour comme un autre pour Anthony. Ce matin, il s'était levé, s'était préparé pour aller au travail. Il avait dit bonjour à sa fille et son fils puis il était parti pour son bureau qui se trouvait non loin de la tamise. Il avait pris sa voiture, l'avait démarré en espérant qu'elle ne tombe pas en panne comme la dernière fois. Il avait détesté cette journée d'ailleurs, sa voiture était tombée en panne, au bureau, tout était calme et son fils avait fait une petite crise. Bref, aujourd'hui, cela allait être une journée comme il les aimait. Déjà, il avait des rendez-vous et sa voiture avait démarré en trombe. Il était bien parti. Faisant vrombir le moteur, il s'élançait dans les rues londoniennes. Anthony avait toujours adoré Londres, plus que l'Irlande. Là-bas, il avait trop de mauvais démons et de mauvais souvenir. Secouant la tête pour sortir de ses pensées, il vint à se garer avant de sortir de sa voiture. Il eut un soupir en voyant les nuages gris et pluvieux qui s’amoncelaient dans le ciel. Décidément, il ne devait pas oublier son parapluie, ce soir. Il était comme ça, Anthony, toujours à oublier son parapluie.Passant une main dans ses cheveux noirs avant de rentrer dans son cabinet. Il était quelque peu moderne, alliant le bois de chêne au style épuré. Sa secrétaire vint lui donner son emploi du temps et les dossiers qu'il allait devoir s'occuper aujourd'hui. 3 ou 4, ce n'était pas énorme mais cela allait faire sa journée. La matinée était passée lentement à son grand dam, des clients peu intéressants. Il voulait un challenge, une chose qui allait le surprendre. Pour le midi, il était sorti prendre un repas rapide avant de s'occuper des dossiers dans la salle de repos. C'était une routine confortable et qui garantissait un avenir pour ses enfants. Il repensait à sa fille, à la belle petite Pearl. Il avait l'impression que plus le temps passait, plus Pearl s'effaçait de sa mémoire. Il se souvenait de ses joues rondes, de son petit nez rond et de ses cheveux noirs. C'était tout. C'était triste. Pour la deuxième fois de la journée, il secoua la tête pour sortir de ses pensées. 15h sonna rapidement et sa secrétaire vint à le prévenir que son rendez-vous était arrivé. Anthony vint à se diriger vers son bureau dont la baie vitrée donnait une vue imprenable sur la tamise qui s'écoulait doucement au gré des courants. Une jeune fille brune aux yeux de biche et une peau halée se trouvait là. Agent du MI6 d'après ses dires. Elle vint à lui tendre la main et il retient son souffle. Il détestait prendre des choses tendues, même des mains. Même s'il avait fait des efforts, cela restait dur et pas très naturel pour lui. Il prit sa main avec un sourire.

-Mme Petterson, enchantée, s'enquit-il avec un petit sourire. Asseyez-vous, ajouta-t-il en lui montrant la chaise.

Elle voulait parler d'une affaire datant de 1995, Anthony vint à s'asseoir et eut un soupire peu convaincu, car des souvenirs lui revenaient en mémoire.

-Je ne suis pas sûre de bien comprendre. J'ai quitté le MI6 en 1990, déclara-t-il avant de prendre conscient d'une chose. Je viens de me prendre un coup de vieux en disant cette phrase, ajouta-t-il avec un sourire.

Voulait-elle parler de Lucy ? Avaient-ils ressorti cette affaire ? Pourquoi était-elle venue le voir ?

   
Au fil des secondes, je regrettais d’être ici. Je mettais en jeu ma carrière. Le MI6 n’était pas au courant. Cette enquête n’était pas officielle. Non seulement je risquais ma carrière mais aussi l’image de mon père et le futur de mon petit frère. Je mettais aveuglement beaucoup de vies en jeux. Enfin… des vies. Quoique, peut-être. Celle de mon enfant. Merde. Je suis enceinte. J’ai encore tellement de mal à me faire à l’idée parfois. Moi ? Avais-je la vie pour être maman ? Non. Je n’en savais rien. Je paniquais sans cesse à cette idée. Et là, j’inspirais doucement quand il se disait enchanté. Je le regardais, assez dubitative en l’écoutant tandis que je m’installais. Je découvrais alors qu’il était un agent. Mais pourquoi son dossier n’était pas accessible ? Pourquoi ne l’était-il plus ? Je fronçais les sourcils sans vraiment me poser plus de questions. Pas maintenant. J’allais la jouer fine. Du moins, j’allais essayer. Toujours aussi calme. Toujours aussi sérieuse. Je posais mon sac à côté de la chaise. Je le regardais avec attention. Je fronçais mon petit nez comme maman le faisait toujours. Cela nous donne un petit côté mignon d’après maman. J’avais toujours eue le petit nez de souris de notre famille. Je lui offrais alors un sourire amical. « Je suis désolée pour le coup de vieux… mais si cela vous rassure, vous paraissez encore jeune ! », lui disais-je alors d’un mouvement de main vers son apparence. J’haussais les épaules en riant légèrement. Un rire cristallin et léger. Je sortais alors un cookie de mon sac, je pensais aussitôt à Cordélia dont les envies de femmes enceintes ou même les symptômes lui causaient des répercussions étant donné qu’elle les subissait. Et moi ? J’avais juste faim. Je mangeais pour deux. « Excusez-moi pour ça, je dois faire attention à mon taux de sucre ! », lâchais-je en arquant un sourcil. « On partage ? », proposais-je alors aussitôt, incrédule. Mais je retrouvais alors mon sérieux. Je sortais un stylo de mon sac et un carnet que j’ouvrais. Je regardais alors mes notes. Des vrais notes. Je ne faisais pas semblant. « Cette enquête est liée au meurtre de Lucy Ryan et le kidnapping de Pearl Ryan. Apparemment votre nom apparait dans nos registres mais nous n’avons aucuns rapports expliquant votre implication dans cette affaire ! Nous en avons aussi très peu sur votre dossier dans notre compagnie ! », disais-je alors en tentant de garder un temps éloigné. Je voulais vraiment paraitre comme une simple enquêtrice sans implication. Je penchais alors la tête. « Vous souvenez-vous de ce dossier ? », demandais-je soudainement sur un ton… plus autoritaire enfin insistant surtout.

   
La jeune femme ne passait pas par quatre chemins. Elle lui ravivait des souvenirs douloureux mais quelque chose en elle l'intriguait. C'était dans sa frimousse, sa mimique qui lui semblait si familier. Cela lui rappelait une personne qui l'avait énormément blessé. Cela lui rappelait Lucy. Son tout premier amour.  Celle avec qui il l'a eu Pearl. Son seul enfant qu'il n'avait jamais pu connaître pourtant il avait tout tenté pour. Quitte à donner de l'argent, ou même faire un deal avec le beau-père. Cet homme, cet imposteur qui s'était fait passer pour le père de sa fille. Ce traître qui lui avait tout volé, qui lui avait gâché sa vie. Tout cela lui était douloureux. Sans s'en rendre compte, cette femme en face d'elle vint lui parler de cette affaire, de cette histoire. Il avait été cité parce qu'il avait payé sa caution. Une caution contre de connaître sa fille. Tout cela pour juste la voir de loin. Il se souvenait toujours de ce visage. Celui de sa fille Pearl. Il hantait même ses nuits. Ce visage aux rondeurs enfantines, ses yeux de biches qui étaient rouges. Anthony avait pu lire une tristesse infinie dans son regard et surtout une certaine blessure. Il aurait tellement voulu venir et la prendre dans ses bras, la consoler. Lui dire qu'il était là pour elle, si elle le voulait.

-Ce n'est pas grave, j'en suis rassuré, déclara-t-il soulagé.

Il fallait qu'il lui dise mais c'était encore un sujet douloureux. Il n'aimait pas en parler. Surtout de Pearl, cependant il le devait. Il fit non de la tête pour le cookie. Il n'aimait pas vraiment cela.

-Non merci, les cookies, ce n'est pas mon truc. C'est plus des bonbons au miel que je préfère, s'enquit-il.

Il prit une inspiration. Anthony s'arma de son courage pour enfin parler de cette foutue affaire dont elle voulait.

-C'est encore douloureux pour moi mais je vais essayer de vous raconter ce qui s'est passé. Mon nom apparaît dans le rapport parce que j'ai payé la rançon du ravisseur qui gardait la petite captive, répondit Anthony d'une voix basse.

Il avait payé pour connaître Pearl. Etre un père pour elle mais hélas, son beau-père l'avait encore trahi. Un jour, peut-être pourra-t-il connaître cette petite fille qu'il n'avait pas pu porter.